Mille livres en tête

Mille livres en tête

Endless Night - T.1 / Estelle EVERY

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J'ai découvert le 1er tome de cette histoire, il y a déjà un certain temps sous Service Presse. Je l'avais commencé, dans une période compliquée, et je n'arrivais pas à me concentrer dessus ; j’étais bloquée sur le personnage de J.C. Allez savoir pourquoi ! Et j'ai lâché l'affaire en me promettant d'y revenir plus tard. Il m'aura fallu près de 2 ans tout de même mais voilà qui est fait. Mais pourquoi ai-je attendu si longtemps !

 

Merci à Fyctia/Hugo Poche Embarrassé

 

Oserais-je dire que j'ai adoré ? Et bien oui, j'ose et certaines personnes savent combien ça me coûte Incertain Pourtant, je ne suis pas spécialement portée sur les histoires interdites au moins de 18 ans voire 16 ans et clairement axées sur une ambiance hautement érotique. Mais quand c'est bien  écrit, ça se lit comme n'importe quel autre genre.

 

Érotique, vous avez dit érotique ? On ne va pas se voiler la face car c'est bien dans cet univers de plaisirs libertins et charnels que va entrer Auxane, jeune journaliste française de 23 ans. Si on lui avait présenté les choses ainsi, croyez-vous qu’elle y serait allée quand même ?

 

Elle a l’impression de stagner dans ce métier qui la passionne pourtant, et pour donner un coup de boost à sa carrière, elle va s'imposer, auprès de sa hiérarchie, pour une enquête journalistique à haut risque, en Russie, terre de ses ancêtres. A Saint Pétersbourg plus précisément, ville des nuits blanches. Pour pouvoir atteindre la cible de cet article, Dimitri LESSKOV, elle va devoir sacrément donner de sa personne en tentant d’intégrer le très select club « LE SECRET » dirigé par la main de fer de Grigori ALEKSEI.

 

« Je suis là de mon plein gré. J’aurais pu choisir un autre job. Mais ma curiosité l’a emporté. »

 

Aidée et hébergée par sa cousine Valentina, elle va se fondre dans les Nuits Blanches russes et au-delà du travail journalistique, sa vie personnelle pourrait bien être impactée. Une chose est sûre : pour Auxane comme pour les lectrices, il sera impossible de résister au charme et au mystère que dégage Grigori. Partie dans un but professionnel, on peut dire qu’Auxane va aller au bout de sa mission et par tous les moyens qui seront permis pour percer les secrets enfouis dans l’atmosphère magique et insaisissable de la Venice du Nord. 

 

Jusqu’où sera capable d’aller Auxane pour parvenir à ses fins ?

Ressortira-t-elle indemne de cette immersion dans un monde si sulfureux ?

 

Ce 1er roman d’Estelle EVERY est classé en New Romance mais à cette appellation il faudrait ajouter « érotique » car, de manière claire, il est plutôt pour des lectrices averties et friandes de tout ce contenu qu’il offre. Ici, pas de schéma de séduction classique ; l’approche est plus sensuelle et érotique par le biais du club « LE SECRET » et de tous les plaisirs et pratiques qu’il renferme.

 

La rencontre entre Auxane et Grigori, l’auteure ne l’a pas rendue simple ; rien n’était acquis. Elle s’est faite de manière cohérente ; à un rythme parfaitement adapté : sensualité ne rimant pas avec rapidité. Chacun va plonger dans un inconnu qui pourrait bien le pousser à réfléchir sur ses attentes, sur ses limites mais aussi le pousser à se révéler à l’autre.

 

« Si je m’écoutais, je balancerais mon verre de vin à la figue de mon potentiel employeur. J’opte pour une approche plus diplomatique »

 

Important concernant Grigori : un certain mystère l’entoure et peu de révélations sont faites. Mais l’auteure a tout prévu : un prequel est disponible dans lequel, en seulement 4 chapitres, on apprend certaines choses sur son passé, son ascension dans ce monde de luxure et surtout les liens qui l’unissent avec Valentina et Sofia, deux personnages importants tout au long de l’histoire. Cette parenthèse introductive est importante.

 

Grigori, ah Grigori ! Un vrai fantasme à lui tout seul ! Homme mystérieux et réservé, dans le contrôle permanent, il est entier, sincère et honnête, véritable Maître des plaisirs et des sens exacerbés. C’est un dominant avéré dont la position ne lui permet pas de laisser place aux imprévus et lui impose un certain charisme. La retenue dont il fait preuve force l’admiration ; comment tant de contrôle peut être possible ? L’auteure, pour son histoire, a choisi de refuser le droit, à Grigori, à toute relation sexuelle avec ses employées. Sauf, que lorsque Auxane – qui pour le contexte reprend son prénom d’origine, Oksana – devient son employée et qu’elle éveille en lui des sentiments inexpliqués, on imagine aisément que l’histoire va se corser et ne pas être de tout repos. Le point positif c’est que malgré l’univers dans lequel il évolue, Grigori n’est pas un misogyne, bien au contraire. Seul le plaisir des femmes – et des hommes aussi, bien entendu - importe et il sait tout mettre en œuvre pour leur donner satisfaction.

 

« L’effronterie d’Oksana m’agace autant qu’elle m’amuse. Mon excitation refait régulièrement surface. Je dois me répéter que je ne couche jamais avec mes employées, et je me surprends à envisager de renoncer à cette règle, juste une fois, juste pour elle »

 

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Face à lui, Auxane est un personnage fort, qui n’a pas peur de dire ce qu’elle pense frôlant parfois les limites de l’arrogance. Au fil de la lecture, on comprend l’étendue de ce besoin de reconnaissance qui l’anime et le pourquoi de certains de ses choix. Et surtout les raisons de ce dépassement de soi qui s’enclenche tel un processus de reconstruction. Ce n’est pas une pleurnicharde ; elle saura le prouver tout au long de cette histoire. J’ai beaucoup aimé, un peu comme un conte des Mille et une nuits, la manière dont elle dévoile son histoire passée. Et ce passé est émotionnellement lourd, ce qui fait qu’on s’attache à son personnage même si on peut ne pas toujours partager ses choix. Dans cette histoire, elle n’est ni plus, ni moins, une jeune femme qui va découvrir, de manière parfaitement assumée, le plaisir des sens et les délices de jeux jusqu’alors inconnus.

 

« Ce soir, tout est différent. Il s’agit de sexe, de domination et de soumission, de voyeurisme aussi. Je n’aurais jamais cru être excitée dans de telles conditions. Je dois pourtant me rendre à l’évidence : la performance des deux femmes me trouble »

 

L’auteure n’a pas choisie une narration à seulement deux voix ; se sont invités aussi les pensées et actes de Milan, un peu beaucoup bad boy mais néanmoins fidèle ami d’enfance d’Auxane et celles de Valentina, sa cousine. Le choix de Valentina est tout à fait justifié puisque le déroulement de l’histoire la met pas mal en avant aussi. Mais pour Milan, je suis restée, un certain temps, plus dubitative sur le pourquoi de ses interventions. Sa relation avec Auxane est assez ambigüe même si on sent bien que des liens assez forts les unissent malgré des vies qui ont pris des chemins opposés. Ce qui m’a gêné, c’est le comportement d’Auxane vis-à-vis de lui ; un peu comme un homme-objet sexuel (je fais peut-être fausse route !). Si l’auteure a choisi de l’intégrer ainsi, c’est qu’il y sûrement une bonne raison pour la suite.

 

« J’ai toujours eu un œil sur elle. J’aurais tout donné pour elle si elle me l’avait demandé »

 

De ce qui s’annonçait comme une enquête visant à faire tomber un homme d’affaire russe, là aussi j’ai été surprise. Il en est bien question, tout au long de l’histoire, mais de manière assez légère finalement. J’ai trouvé que c’était plus une base pour amorcer l’entrée dans un autre sujet, où tout est soigneusement lié. Ca n’empêche pas que l’histoire réserve son lot de surprises et de rebondissements notamment avec le personnage de Valentina, dont je ne vous dirais rien, pour lequel un truc bizarre s’est manifesté en moi dès le départ. Comme une idée sur elle qui n’a fait que se confirmer.

 

Estelle EVERY emmène son lectorat dans un univers à mettre en ébullition les hormones les plus chatouilleuses et à désagréger les lingeries mises à rude épreuve. C’est un pari osé : ça passe ou ça casse !  Beaucoup de scènes torrides, des mots "crus", des situations érotiques jouant avec nos émotions ou celles des personnages et atteignant parfois les limites du BDSM. Alors oui, certaines scènes, où le nombre de partenaires dépasse la norme, peuvent choquer par le côté « crue » qu’elles sous-entendent ou qu’elles abordent de manière plus explicite. Mais au-delà de tout ce sexe, il faut voir la sensualité qui transparaît, pour ne garder en mémoire que l’aboutissement des plaisirs recherchés tel un art ancestral. L’acte d’amour existe depuis que le monde est monde et nulle ne saurait certifier qu’il en était autrement avec nos ancêtres, et avec les leurs avant eux. Alors, de grâce, ne crions pas au « Oh shocking ! » !

 

C’est un sacré exercice d’écriture qu’à accompli l’auteure en ne prenant pas de pincettes, où de chemins détournés pour alléger le côté sensuel et torride de l’histoire qui ne fait que mettre en lumière quelque chose qui n’est pas monté de toute pièce pour une histoire. Un mot pour une situation, un sentiment ou un acte ; et pas un autre. Elle s’est fixée un but ; elle y est allée direct. Elle jongle entre amour et haine, entre force et fragilité, entre retenue et lâcher-prise. Et démontre que de l’obscurité à la lumière, le fossé n’est pas si grand.

 

Le libertinage est un sujet tabou et qui doit être abordé avec beaucoup de précaution ; car beaucoup de personnes trouvent ça malsain, limite assimilé à du porno. Il ne s’agit pas d’un univers fait d’orgies sexuelles à gogo, bien au contraire. C’est un art de séduction, parfaitement assumé, où chacun est à l’écoute de son corps, de ses désirs et à ceux de son/ses partenaires avec un même objectif : prendre et donner du plaisir au-delà de la morale conventionnelle, tout en respectant l’autre,  ses attentes et de son droit à dire non à certaines pratiques. Chacun a le droit de vivre sa sexualité comme il l'entend ! Personnellement, aucun problème de moralité n’accompagne cet art de vivre, dès lors qu’il est pratiqué comme il se doit. Et Estelle EVERY l’a, selon moi, parfaitement traité et mis en valeur dans ce 1er tome que j’assume, parfaitement, avoir adoré !



07/05/2020
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