To be or not to be... bookstagrameuse
Toutes les vérités ne sont pas bonnes à dire mais nécessaires lorsqu'on se respecte soi-même et quand la coupe est pleine, ça déborde. Et puis poser les choses, noir sur blanc, permet de rendre concrets des faits, des ressentis et des évidences, négatifs ou positifs.
À l'heure où Bookstagram est devenu une fenêtre ouverte sur un besoin de reconnaissance sans cesse grandissant, je ne me considère pas (et ne me suis peut-être jamais considérée) comme une bookstagrameuse. J'essaie de partager mes avis sur les livres que mon parcours de lectrice rencontre. Force est de constater que lorsque ça ne veut pas prendre, ça ne prend pas. C’est l’jeu ma pauvre Lucette !
Eh oui, il y a de cela très longtemps, on m'avait dit "tu verras booksta c'est une famille, une communauté, de la bienveillance, etc...". Un monde où tout le monde est beau, tout le monde est gentil, en somme. Mais est-ce qu'une seule personne m'a un jour souhaité la bienvenue ? Non.
Plus de 4 ans après avoir créé ma page, le constat est là et bien là, sans amertume aucune. Je précise pour qu’il n’y ait aucune méprise. A mes yeux, bookstagram est tout sauf un monde où la gentillesse et la diversité sont les grands gagnants. C’est plus une arène où chacun/chacune, pensant avoir un peu de talent, se lance pour en ressortir vainqueur. Et où la compétition a pris le dessus sur l’échange. Mais attention à quelle couleur peut avoir la médaille finalement récoltée. Peut-être qu'elle ne sera qu'éphémère et sans saveur telle que celles en chocolat que mangent les enfants. Ou au pire, un Bescherelle ou un dico en lot de consolation, c’est pas mal aussi !
Moi je n'ai jamais eu l'esprit de compétition et beaucoup de choses tentées se sont soldées, de manière logique, par des échecs. Mais la vie c'est ça : se prendre des claques, se relever et, pour les plus obstinés, recommencer dans l'espoir de forcer un destin qui n'est écrit nulle part. Personnellement, après un échec je ne récidive normalement pas !
J'avais une première fois arrêté tous mes réseaux sociaux pour ne plus subir une méchanceté certainement justifiée, des attaques parfois virulentes pour certains légitimes probablement. J'avais renoncé à tout ce à quoi je tenais et ce monde dans lequel je pensais, à tort, mériter ma place.
Et puis, en avril 2020, en pleine crise sanitaire, j'ai tout recommencé à zéro, de manière assez discrète puisque je ne suis pas une personne extravertie qui veut à tout prix récolter les lauriers d'une gloire virtuelle qui à mon sens n'est juste que de la poudre aux yeux. Et je n'avais aucune attente ; juste partager mes avis. Mais chassez les attaques, elles reviennent au galop. L'histoire s'est répétée encore et encore, sans que je comprenne la source du problème.
J'ai revu ma copie. J’ai été accusée de copier les idées d'autres comptes, de partager des choses personnelles qui n'avaient rien à faire sur la communauté booksta, de faire des stories face cam alors que c'est quelque chose de réservé aux jeunes, j'ai même eu la très belle remarque qu'une "daronne" n'a rien à faire sur les réseaux sociaux avec des avis à endormir même le plus insomniaque. Bref... des perles comme ça, j'en ai assez pour écrire un petit recueil.
Je me suis donc intéressée à cette fameuse communauté soi-disant si accueillante mais si sélective. Et effectivement, j'ai compris le pourquoi du comment : je suis trop vieille. Je me suis rendu compte que j'étais arrivée à la date limite de péremption voire que je l'avais dépassée depuis quelques années. Déjà mauvais point pour moi qui ai découvert qu’à partir de 45 ans on fait partie de la catégorie « SENIOR ».
Autant il y a du bon voire du très bon humainement parlant – pas mal de pages que je suis sur Insta sont concernées et sont de vrais rayons de soleils - ; autant, il y a ce qui se fait de plus mauvais dans l’espèce humaine, animé par un ego démesuré. J’ai sélectionné 5 « perles » sur Booksta et ça envoie du lourd.
Ce que je n'avais pas compris dans le principe booksta, c'est qu'il fallait en permanence s'exposer pour faire exploser les compteurs, et de manière personnelle, c'est encore mieux. Parce que finalement Bookstagram, c'est juste une autre forme de télé-réalité ; au même titre que TikTok. L'audience ce ne sont pas des téléspectateurs mais des abonnés qui s'intéressent plus à ta vie qu'à tes lectures.
A mes yeux, Bookstagram c'est un mélange de trois émissions : "Les reines du shopping", "Le divan" et « Le magazine de la santé » pour les personnes qui ont les références. On pourrait peut-être ajouter un soupçon de « Danse avec les stars » et « The voice » version playback. Par contre, Bookstagram n’a rien de « La dictée de Pivot » ! C'est aussi une belle scène de théâtre pour interpréter le rôle de sa vie dans la catégorie « dramatique ». Certains/certaines pourraient facilement récolter un César tant ils/elles mettent du cœur à l’ouvrage pour descendre bien bas.
Il y aurait plusieurs palmes à décerner – (et les 5 nominés sont…) tellement certains/certaines ne craignent pas le ridicule et n’hésitent pas, chaque jour, à faire un show dans les règles de l’art.
Des stories santé « MayDay, MayDay, Michel CYMES, sortez-les de là », en veux-tu en voilà, où on sait qui :
- va faire un test Covid presque en temps réel – c’est pas comme si on n’avait pas tous ce souci, quel courage ! -
- croit qu’il/elle avait un cancer juste parce qu’il/elle était malade – attention, ligne rouge presque atteinte -,
- a envie de faire pipi ou son popo mais risque de louper le coche,
- fait une crise d’angoisse de manière récurrente, va se couper des réseaux sociaux pendant plusieurs jours et revient en story 2h après avoir peut-être rongé ses faux-ongles – tu ne te serais pas fait avoir sur la qualité ? -,
- s’est fait un petit bobo – oh le joli pansement ! Je peux te dessiner une poupée si tu veux ! – ,
- qui… il y en a à la pelle, et pas des petites pelles !
Des stories « tu es déprimé, j’t’en ressers une dose ? Ou une petite psychanalyse ça te dit ? … » qui te pousseraient facilement au suicide tant,
- le manque de confiance en soi est présenté la larme à l’œil et les trémolos dans la voix – mais bon, tu es quand même là à t’exposer donc info ou intox ? - ,
- l’exposition de l’insomnie qui sévit 6 jours/7 chez certains.e.s est un excellent soporifique naturel pour d’autres - et si jamais un médecin passe par là pour donner la solution miracle, sait-on jamais ; lisez mes chroniques ! -,
- la médecine est présentée comme impuissante pour solutionner pas mal de petits bobos mentaux - si les anti-dépresseurs ne fonctionnent pas, c’est que le problème est peut-être ailleurs, non ? -.
- la grande mode s’est de se photographier ou se filmer dans son lit, en train de pleurer pour un bouquin pour convaincre ceux qui aiment pleurer de pleurer avec toi – et au passage, ne pas oublier de mentionner que tu les as influencés, ça flatte l’ego –.
Mais quand apparaîtra le VIDAL en Service Presse ? Ça pourrait être sympa !
Des stories « tu ne sais pas comment te fringuer, viens chez moi j’me sens grave belle … » qui donnent juste envie de dire « sérieux ? pas trop douloureuses les chevilles ? », tant
- n’est pas mannequin chez Victoria’s Secret qui veut… ! Autant pour la lingerie que pour les défilés !
- Cristina CORDULA aurait bien besoin de mettre son grain de sel dans certains dressings mais ne dirait pas « Magnifaiik » - la tenue tout blanc c’est pour une soirée Eddy Barclay à St Tropez ? - la classe n’est pas quelque chose d’inné, ça s’apprend – tu veux un coach ? Non pas moi, je passe mon tour –
- on a envie de dire « ta morphologie c’est laquelle déjà ? 8, H, O… Ah, d’accord, si tu l’dis ! »
C’est connu, l’espoir fait vivre ! Donc…
Et les livres, on en parle quand du coup ?
Car c’est bien beau mais dans Bookstagram, il y a BOOK donc… livre, en français. Mais Bookstagram est devenu une véritable plateforme virtuelle, qui révèle les vraies personnalités de certain/certaines qui courent après les abonnés, les likes, les partages et… les partenariats, le graal !
Les abonnés : espèce en constante reproduction qui ne risque pas l’extinction totale.
Les likes : petits clics qui récompensent le travail accompli – même s’il est mauvais, sur un malentendu ça peut fonctionner -
Les partages : actions qui engendrent plus d’abonnés donc plus de likes – tu me partages, oh trop sympa donc je te partage aussi du coup. Non, ne me remercies pas ; ça me fait plaisir -
Les partenariats : cerise sur le gâteau pour qui n’a pas forcément de talent mais qui y croit
Finalement, Bookstagram n’a plus grand-chose de littéraire car devenu une gigantesque énigme mathématique. Pour réussir, plus besoin de savoir écrire. Il faut juste savoir compter – le plus loin c’est mieux -. On compte ses abonnés, on compte ses bouquins reçus en SP comme de véritables trophées, on compte le nombre de pages lues à l’heure, on compte le nombre de bouquins lus par an, on compte le nombre d’exemplaires d’un même livre acheté sous toutes ses formes, on compte toujours et encore… Je compte, tu comptes, ils/elles comptent !
Plus besoin d’avoir un vocabulaire recherché pour écrire une chronique (donc exit le dico des synonymes, ouf !) puisqu’un peu comme le classement des prénoms à la mode chez les nouveau-nés, Bookstagram peut lui aussi se vanter d’avoir son classement pour les termes courts et peu efficaces qui fleurissent dans toutes les bouches et dans tous les avis. Et les grands gagnants sont… « grave cool », « kiffé », « fluide », « addictif » et « pépitas » ! Bravo, vous faites du bon boulot !
Plus besoin de savoir écrire non plus puisque qui va faire gaffe à l’orthographe et à la conjugaison tant qu’on comprend la pensée première. Je te mets un « j’ai aimé » par ci, « j’ai pas aimé » par-là, on saupoudre avec un peu de « l’auteure a une écriture fluide et addictive » et hop, emballé c’est pesé, circulez ma p’tite dame !
Pas besoin non plus de faire dans les sentiments – derrière, il y a quand même un auteur qui a bossé dur donc un être humain - : pas de filtre, pas de respect, plus aucune limite pour se prouver qu’on a du courage. L’auteure a écrit de la merde ? Eh ben tant pis pour elle, disons les choses telles qu’elles ne devraient jamais être dites : ce livre c’est de la merde, à éviter ! Et tout ça, sur le net ! - Peut-être que tu n’as pas compris l’histoire tel que le message voulait être transmis ? – La modération n’est pas une pratique enseignée à l’école et Bookstagram n'est pas un bon formateur -.
Bookstagram, c’est aussi le producteur officiel d’une multitude de bookstagrameurs préférés des bookstagrameurs et d’apprentis influenceurs qui sont à la limite de se revendiquer être à l’origine de la rupture d’un livre. Là, on joue dans une autre catégorie. Chacun y va de sa touche personnelle, de son mouvement pour soulever Booksta et faire entendre sa voix ; en somme chacun veut sa part du gâteau ou du pactole !
Car Bookstagram en fin d’année c’est « alerte générale, les partenariats sont ouverts. Il faut que je fasse bonne impression ! ». Ça rue dans les brancards pour décrocher une place au soleil dans les transats des principales maisons d’éditions, ça publie 24/24, ça identifie, ça partage… ça brosse dans le sens du poil quoi.
Et puis quand vient l’heure des résultats – après avoir bien stressé dans des stories à n’en plus finir - , il y a ceux/celles qui pleurent parce qu’ils/elles n’ont pas été reconduits et il y a ceux/celles qui jouent les étonné.e.s parce BINGO, c’est bon - ah ben je comprends que tu puisses être étonné.e ; la correctionnelle n’était pas loin pour toi ! - .
Petite aparté
Depuis que je suis sur Booksta, j’ai tenté peu de partenariats car être partenaire c’est un engagement sérieux et je ne lis pas un livre par jour. Depuis mes débuts en 2017, jusqu’à 2021, j’ai été partenaire FYCTIA ; ce qui est un immense honneur permettant de découvrir beaucoup d’écrits de très belle qualité. Et j’ai tenté HUGO NEW ROMANCE à plusieurs reprises car c’est la maison d’édition qui m’a fait découvrir la New Romance - 50 Nuances de Grey, Endless love et After – et qui compose les 3/4 de ma bibliothèque. Et j’ai assisté à tous les FNR jusqu’à 2021 (le pire pour moi certainement même s’il était vraiment très bien organisé comme toujours).
Durant l’été 2021, certaines de mes abonnées le savent, j’avais pris la décision de fermer ma page pour ne garder que mon blog. Et j’ai fait un pari avec l’une d’elle : postuler à 3 gros partenariats et prouver que je serai recalée. Et j’ai gagné puisque je n’ai été retenue ni chez Hugo New Romance, ni chez Black Ink, ni chez Plumes du Web. Rassurez-vous, je l’ai bien pris car simple formalité pour moi. M’avez-vous vu pleurer en story ? Non, je ne crois pas.
Pour les partenariats 2022, j’ai été surprise car certaines conditions m’ont sauté aux yeux notamment concernant l’orthographe et le contenu des chroniques. Logique quelque part ! Pour ma part, je ne m’attendais à rien mais je pense être obligée de reprendre mon dico pour vérifier la définition du mot « orthographe » qui a dû changer de sens. Parce que là, je suis à deux doigts d’organiser un vrai concours spécial « Bescherelle ».
Fin de l’aparté
Ah, ces partenariats ! Ils sont à la littérature ce que les Oscars sont au cinéma même si les conditions d’attribution sont largement différentes. Je ne m’étendrais pas sur le sujet mais il y a quand même des points troublants…
Et ces partenariats remettent en route, la machine de la compétition et de l’adversité. C’est reparti pour un tour ! Certains partenaires se sentent pousser des ailes, l’orgueil regonflé à bloc pour maintenir le cap dans la méchanceté et la vantardise et rester fidèle à eux-mêmes ; leur conférant un sentiment de toute puissance et d’immunité – ça a fonctionné une fois ; allons-y gaiement ! -. Mais certains exemples montrent bien qu’être partenaires ne prouve pas de la qualité d’un avis ; les maisons d’éditions savent elles aussi compter. Toutes les explications se trouvent dans les comptes, dans leurs comptes !
Bookstagram est un vaste sujet ; peut-être que quelqu’un, quelque part est en train de l’étudier. Pour moi, ça s’arrête là.
Car dans les comptes que je peux faire sur Bookstagram, je ne retiens que le nombre de personnes bienveillantes, qui me redonnent le sourire grâce à leur bonne humeur, à leur simplicité, à leur naturel et qui m’aide à continuer à croire qu’il n’y a pas que du mauvais sur Bookstagram.
Je ne suis pas parfaite et j’en ai conscience ; elles ne sont pas parfaites et je suis certaines qu’elles en sont conscientes aussi. Et c’est ce qui fait que j’aime les suivre : elles ne jouent pas un rôle. Je ne pourrais pas toutes les citer (pour beaucoup je pourrais être leur daronne) mais il y a mes twins préférées de Blog de Lyosa, l’adorable Sam, de My Tagada et sa comparse Lo.is.reading, Mayiah de Madame Lecture qui est une plus que superbe rencontre, Julie de Reading.time.by.julie, Marion de Marionlibro, Feïza chez Les amoureux des lettres qui est si talentueuse de simplicité dans ses avis, etc… il y en a tant d’autres.
Et je n’oublie pas ces auteures sans qui je ne serais pas là aujourd’hui, sans qui je ne serais peut-être pas celle que je suis aujourd’hui. Je ne vais pas les citer, elles se reconnaîtront car elles sont deux à avoir une place particulière dans mon cœur même si nous ne sommes pas amies.
Alors oui, mes chroniques sont longues mais elles sont construites, elles sont respectueuses et jusqu’à il y a peu, je les transmettais aux auteures avant publication pour qu’elles ne soient pas prises au dépourvu. La publication des chroniques contenant du négatif se faisait avec l’accord de l’auteure ; jamais de manière sauvage. Ce temps-là est révolu ! Oui mes visuels sont ringards et pas du tout dans l'air du temps. Mais 50 ans en photo ne feront pas le même rendu que 18. Si, si je vous assure !
Entre le virtuel et le réel, mon choix est fait depuis longtemps : ma vie personnelle, la vraie, passera toujours avant quelque chose qui n'est que fictif. J'ai la chance d'avoir une famille en or, des enfants qui ont une maturité que certains sur Insta n'auront peut-être jamais à ce rythme-là, un boulot qui me comble et dans lequel j'évolue de manière plus que positive puisque j'atteindrais bientôt mes objectifs.
Alors oui, j'ai 50 ans et j'ai la lucidité qui va avec, heureusement ; même si ça n'empêche pas d'être blessée ! Parce qu'entre 14 et 25 ans, on vit encore un peu au pays des Bisounours ; n'ayant d'autres préoccupations que ses loisirs. Mais la roue tourne pour tout le monde même dans le virtuel. Il ne faut jamais rien considérer comme acquis ! Et pour moi le choix est simple : le réel l'emportera toujours !