Mille livres en tête

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Si belle, Sybille - Valentine LALANDE

Si belle Sybille Montage.jpgQue l'on ait 17, 20, 30 ou 50 ans, il y a des lectures qui ont un impact émotionnel identique. Dès lors que certains sujets forts sont mis en lumière, la barrière de l'âge - que je pensais exister pour lire du New Way - n'existe effectivement pas.

 

"Si belle, Sybille" est mon premier New Way – ouf, il était temps - ; celui par lequel je voulais découvrir ce genre mais sans savoir "pourquoi lui". Je l’avais acheté directement en format papier car je connaissais déjà la plume de Valentine LALANDE ; ça ne me semblait pas être une prise de risque.

 

Ce roman, dans lequel les préjugés mettent à mal des êtres et des sentiments, illustre parfaitement les préjugés que j’avais sur ce style : infondés et injustes.

 

Dans cette histoire, Sybille et Sofia, 17 ans, sont meilleures amies depuis 4 ans et ont en commun un certain manque de confiance en elles et une fâcheuse tendance à se dénigrer. Ce qui les différencie, c'est la manière de gérer ce "handicap". Victimes de préjugés et d’un certain harcèlement, l’une sait les affronter en paraissant détachée et insensible alors que l’autre préfère rester discrète voire transparente pour ne pas trop les attirer et devoir s’y confronter.

 

« Comme je suis lâche, je passe mon temps à l’éloigner de ses bourreaux pour lui remonter le moral plutôt que de les affronter. J’aurais trop peur de devenir à mon tour leur victime »

 

L'une est rousse, ronde, d'apparence extravertie et attirée pour le very bad boy du lycée et déstabilisant Samuel aux réparties acerbes voire humiliantes. Alors que l'autre est brune,  totalement introvertie, se cachant sous des vêtements classiques, se fondant dans la masse pour passer inaperçue, rêvant d’être un jour publiée et secrètement amoureuse depuis le collège de Soren, l'élève le plus beau mais aussi le plus discret et mystérieux de sa classe.

 

« Je serais bien tenté par une petite aventure avec « big beauty » dans ton genre. Ça me changerait des planches à pain que je me tape d’habitude »

 

Lors d'un devoir en binôme, pour  écrire un poème ou un texte qui rend hommage à un camarade tiré au sort, Sibylle espère que la chance va lui sourire enfin en l'associant à celui qui fait battre son cœur. Sauf que le tirage au sort va désigner sa meilleure amie pour travailler avec Soren ; Sibylle devra faire avec Samuel, l'être qu'elle déteste certainement le plus. Et, pour couronner le tout, ce binôme ne sera pas du goût de Lou, la reine du lycée qui fait et défait les réputations et les rumeurs au gré de ses manigances et de sa jalousie.

 

« Il faut que je voie cette expérience comme une bonne action, un peu comme si j’allais prêter main-forte à la Croix Rouge »

 

Voilà les personnages qui vont voir leurs vies chamboulées, leurs premiers vrais émois remis en question et leurs amitiés misent à l’épreuve pour un départ dans la vie où l’acceptation de soi et la confiance en soi passeront par un long chemin à parcourir, semé d’embûches que seuls eux pourront choisir d’encaisser sans rien dire ou d’affronter courageusement avec les armes de leur jeunesse.

 

Dans un univers sans pitié, la faiblesse des uns ne pourrait-elle pas devenir une force pour affronter la rivalité populaire ?

Du chaos, l’amitié et l’amour auront-ils une chance de voir le jour ?

 

Ce roman est une belle révélation pour moi, pour cette année 2021 qui me voit faire mes premiers pas de lectrice New Way ; il était temps. Les préjugés – encore ceux-là qui s’invitent partout - m’amenaient à penser à une lecture un peu guimauve, vu l’âge des personnages, à laquelle je ne trouverais aucun plaisir ou intérêt, compte tenu que plus de 30 ans me séparent d’eux.

 

Je me suis immédiatement plongée dans cet univers de lycéens pour découvrir des personnages touchants, tous à leur manière ; même ceux qu’il serait légitime de détester. Et j’en ressors malmenée dans mes certitudes.

 

Sybille et Sofia, sont toutes les deux très attachantes car maladroites, de la même manière, dans l'expression des sentiments. Mais, malgré une grande différence de caractère, c'est un véritable amour, parfois mis à l'épreuve par certaines tensions, qui les unie.

 

« Tu te méfies de tout le monde, bougonne-t-elle. Et toi, tu ne te méfies pas assez.

A nous deux, nous sommes parfaites »

 

Et puis, il y a les deux personnages masculins principaux qui sont bien opposés également : Soren, discret et sans histoire est celui qui reste au fond de la classe sans faire de vagues, ses pensées tout le temps plongées dans son carnet de croquis. Quant à Samuel, c’est tout l’inverse : c’est le bad boy du lycée, qui n’a rien du premier de la classe, qui fait un peu la pluie et le beau temps avec Lou, sa comparse féminine. Ses paroles et jugements semblent tellement tranchés et incisifs qu’on pourrait facilement le rendre responsable de tout ce qui se passe de mauvais dans ce lycée. Mais une chose qu’on ne peut pas lui reprocher c’est qu’il se montre toujours tel qu'il est, avec ses qualités et ses défauts.

 

« Pour une fois c’est agréable de ne pas être à l’écart et de se mêler aux autres »

 

Sauf que les apparences peuvent être vraiment trompeuses et c’est bien là le contenu de ce roman : tout est une question d’apparences. Que ce soit en bon ou en mauvais, elles sont toujours à l’origine de pas mal de maux. Et l’auteure a parfaitement maîtrisé le sujet.

 

« Celle qui possède une répartie d’enfer et semble se moquer des remarques assassines est très éloignée de celle que je suis réellement »

 

Si belle Sybille Montage Citabook.jpg
Mais sous la dureté des mots, des actes, des comportements et des réactions, j’ai ressenti aussi assez souvent comme une immense douceur et beaucoup de tolérance ; ce qui est assez contradictoire, je le conçois tout à fait. Au travers de cette histoire, l’auteure aborde des thèmes forts tels que la grossophobie, la cause LGBT, la confiance en soi et l’intégration scolaire. Et ceux plus touchants comme la famille et les animaux.

 

C’est au travers de différents points de vue que l’histoire évolue. Ce qui nous permet d’entrer dans les pensées de chacun et de nous rendre compte des dommages ou bénéfices invisibles collatéraux qui ne vont cesser d’intervenir, bousculant sur leur passage nos propres certitudes quant à ce qu’une possible romance puisse naître de ce chaos et apportant un rythme qui ne s’essoufle pas.

 

On se laisse prendre dans les filets de l’écriture de Valentine,  oscillant entre tristesse et joie, entre violence et douceur et entre tendresse et colère. Même s’il y a des scènes vraiment poignantes, les larmes n’ont pas joué les trouble-fête car sous les faiblesses des personnages se cache une force propre à chacun. Force parfois insoupçonnée et insoupçonnable et qui évolue tout du long. Et une petite d'humour qui apporte de la légèreté à des sujets importants.

 

« Les personnes mauvaises prennent pour cible ceux qui ont des failles pour ne pas dévoiler les leurs »

 

Au cœur de cette histoire, il y a une belle place de réservée à la famille dans ses bons ou mauvais visages. Des oppositions de taille sautent aux yeux entre la famille de Sybille et celle de Samuel. Ce qui ne laisse pas indifférent et apporte beaucoup d’émotion à l’ensemble. Et ça m’a permis de me rendre compte que New Way ne signifie pas que les adultes sont exclus de l’histoire et ne peuvent pas en faire partie de manière active comme l’illustre bien un des adultes de ce roman que je ne citerai pas pour ne pas spoiler. Mais que j’ai adoré suivre dans ses joies, ses peines et ses galères.

 

Lorsque les certitudes sont en proie aux doutes et à la suspicion, les univers de chacun se voient chamboulés et l’auteure parvient à nous faire ressentir les joies, les peurs, les désillusions, les bonheurs et les peines au travers du quotidien de ces jeunes adultes malmenés par des comportements dictés par des préjugés et des apparences.

 

« Et s’il m’avait approchée pour se moquer de moi ? »

 

En tout cas, je n’ai plus aucun doute quant à ce genre qui m’a ravie ; le livre ayant été dévoré en quelques heures à peine et une quantité incroyable de post-it ayant coloré les pages ; comme pour affirmer que cette histoire est poignante certes mais pas triste et pour ne rien oublier de ces nombreux très beaux passages. Impossible de le lâcher.

 

Ma chronique sera peut-être hors sujet - je n'aurais rien compris à l'histoire et au style New Way - et je ne dis pas que je ne lirai que ça ou que tous les titres New Way me conviendront mais c’est une expérience pour laquelle je n’ai aucun regret. Et « Si belle, Sybille » était vraiment le titre idéal et je suis tellement heureuse qu’il ait croisé ma route. Si vous n’avez pas encore sauté le pas, vous savez ce qu’il vous reste à faire !



15/05/2021
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